Ma plus jeune tante, la plus jeune sœur à maman (elle a 90 ans) est tombée à Noël de l’an dernier et c’est le genou qui a tout pris.
Depuis elle ne compte plus les interventions chirurgicales, les séjours à l’hôpital de Laval. Rien n’y a fait. Incapable de marcher, genou douloureux et énorme, elle a été emmené, en désespoir de
cause, à l’hôpital de Pontchaillou à Rennes. Là encore deux interventions chirurgicales et aucune amélioration.
J’étais à Laval le dimanche 7 octobre chez ma frangine et, avec une cousine, nous avons décidé d’aller voir notre tante.
Nous l’avons trouvé dans un état de grande dépression demandant qu’on la ramène chez elle à Laval (‘Regardez ces murs, disait-elle, il n’y a rien dessus, ici je ne connais personne, j’en ai plus
que marre …’) ou qu’on lui donne des comprimés pour qu’elle en finisse avec cette vie.
Notre tante est une femme qui aime la vie qui déborde, les amis, les balades, les parties de cartes, les rencontres, la danse, les bonnes histoires et le rire, les bons repas … elle écume tous
les lieux où ça belote. La connaissant et l’aimant nous avons bien compris sa déprime !
Nous
avons fait mémoire ensemble de quelques moments vécus avec elle et les aventures cocasses avec leur crise de rire. Petit à petit, notre tante s’est apaisée et à notre plus grande joie, s’est
jointe à nos rires.
Le lundi le téléphone a sonné chez ma soeur. C’était le chirurgien de Rennes qui nous téléphonait. Il avait tenté de parler avec notre tante pour lui dire ce qu’il comptait faire : mettre
une prothèse. Tante avait déjà eu des prothèses à son genou et lorsqu’elle entendait le mot prothèse elle éclatait en sanglots et ne voulait plus rien entendre. Le chirurgien aurait du le
savoir ! Puis il nous a dit qu’il lui avait demandé qui décidait pour elle ; ‘C’est moi !’ a-t-elle crié. De fait qui peut mieux qu’elle savoir ce qu’elle désire qu’on fasse dans
son corps ?
Le chirurgien ne sachant plus que dire, il nous avait appelé. Pour lui il y avait deux solutions : un nettoyage complet du genou, plus poussé que d’habitude ou rendre la jambe raide. Il
voulait notre présence pour en parler avec notre tante.
Le
mardi donc, re-direction Rennes. Nous avions rendez-vous à 11h30. le chirurgien est arrivé à 13 heures. la tante commençait à s’énerver sérieusement. Quelques mouettes cherchant à manger sur le
rebord des chambres de l’hôpital nous ont fait patienter. Nous leur donnions des biscuits et elles frappaient la vitre pour en avoir d’autres.
Le chirurgien est enfin arrivé. Un interne jeune et d’abord facile. Malheureusement ce rigolo a prononcé le mot prothèse dans sa première phrase et il nous a fallu ramer pour rassurer notre tante
et lui dire que quoiqu’il en soit ce serait elle qui déciderait. Ce que ma tante désirait c’était rentrer chez elle le plus rapidement possible, elle en avait marre de cet hôpital. D’après le
chirurgien rendre la jambe raide supposait plusieurs mois de présence à l’hôpital. il a donc été décidé un nettoyage et un retour à Laval.
L’interne nous a parlé de microbe qui attaquait le cartilage mais à la question de savoir d’où venait ce microbe et pourquoi sa présence, nous n’avons eu aucune réponse.
Nous
sommes repartis de l’hôpital avec l’assurance que l’intervention chirurgical aurait lieu le lendemain et en laissant une tante presque heureuse.
Le mardi soir ma sœur téléphone aux infirmières de l’hôpital de Rennes pour savoir si l’intervention s’était bien passée. ‘Elle n’a pas eu lieu, nous apprend l’infirmière au bout du fil. Votre
tante n’est pas considérée comme une urgence.’
Nous téléphonons aussitôt à notre tante. Elle est incapable de parler. Nous n’entendons que des sanglots, des bouts de mots : en finir, ne plus vivre, comprimés…
La dépression et le risque de suicide n’est pas une urgence à l’hôpital Pontchaillou de Rennes.
Nous
en sommes là à ce jour (11 octobre 2012)